LES FONCTIONNAIRES:LES UTILES ,LES INUTILES ET LES NUISIBLES

 

 

 

                                                                          LES UTILES ,LES INUTILES ET LES NUISIBLES

 

 

 

 

 

Le service public est quelque chose de bien français, de typiquement français. Il l'est tellement qu'il est associé, dans l'esprit des analystes à la construction de ce pays, depuis les temps lointains où il est avant tout affaire de juristes soucieux d'élaborer sa doctrine jusqu'aux Trente Glorieuses où il va jouer un rôle déterminant dans la prospérité que connaitra la France.

 

Le Choléra de l'Europe communautaire est depuis passé par la et avec lui une conception toute anglo-saxonne et donc plutôt ratatinée du service public. Le Royaume Uni de Thatcher et de Blair puisent manifestement leur philosophie dans cette vieille Angleterre qui disait « Malheur aux pauvres ». Le dogme de la concurrence a eu raison des services publics les uns après les autres, la Poste étant le dernier à se battre pour ne pas mourir dans ce Fort Alamo menacé par les sbires mondialisateurs bruxellois.

 

Quant aux fonctionnaires, noyau dur de ce service public , on dira qu'il sont passé du statut d'utile à celui d'inutile avant qu'ils ne deviennent des nuisibles dans un avenir prévisible.

 

Les fonctionnaires utiles

 

Les instituteurs étaient les Hussards noirs de la République. En ces temps où sont nées les libertés publiques, où l'on ne savait pas qu'elles seraient bradées sur l'autel du politiquement correct cent vingt ans plus tard, ils ont arraché le pays à l'ignorance et à la bigotterie. D'autres ont suivi : l'administration des Ponts et Chaussées est sans doute peuplée d'ingénieurs généraux arrogants prétentieux et imbuvables mais c'est elle qui a construit nos routes, nos infrastructures et permis la modernisation d'une nation de paysans. La démocratie locale aurait eu bien du mal à s'organiser si n'avaient été aux côtés des maires des percepteurs qui ont pris en main les finances locales.

 

Tout n'est certes pas positif dans tout cela : Il y a , au centre du dispositif les Préfets et le ministère de l'intérieur, création napoléonienne mi-politique mi-policière qui incarne l'arrogance d'un Etat qui n'entend pas être soumis à la loi commune. On sait comment est née la juridiction administrative . On sait aussi le décalage qui existe entre ce qu'est sa jurisprudence et les exigences d'une démocratie moderne. La Cour de Strasbourg est la pour le rappeler suffisamment fréquemment.

 

Il n'en reste pas moins que le bilan a été, pour reprendre une expression d'un certain, globalement positif.

 

Tout cet ordre est aujourd'hui en guenille

 

Les Inutiles

 

Sarkozy entend ne pas remplacer un fonctionnaire sur deux : il a tort et il a raison.

 

L'offensive communautaire contre le service public mais aussi le fait que l'Etat est devenu l'Homme malade de notre époque,expliquent cela. Un Etat tout à fait incapable d'assurer ses missions de régulation et d'aider à la production de richesse mais pas assez moribond pour user de son pouvoir de nuisance.

Ajoutons à cela la décentralisation qui a installé des pouvoirs parallèlles de plus en plus puissants et riches.

 

Une administration pléthorique comme l'administration d'Etat ne pouvait l'être que parce que, à côté des missions régaliennes somme toute pas si nombreuses, il y avait d'immenses bataillons en charge de fournir des services aux citoyens mais aussi aux 36 000 maires de l'hexagone.

 

Tout cela part en quenouille : soit on a carrément transféré aux certaines missions aux collectivités ( entretien des routes, des lycées et collèges, RMI) soit on supprime ces missions au nom de l'absence de concurrence déloyale avec le secteur privé (ingénierie publique concurrentielle)De vaste pas de l'administration déconcentrée de l'Etat (DDE, DDAF , Trésoreries) sont aujourd'hui en quête d'une utilité qui leur échappe et promises à une lente agonie sous la nouvelle ferrule caporalisée des préfets.

 

Même quand le service publics n'est pas en cause,en tout cas pas encore comme c'est le cas pour l'éducation nationale, la crise d'identité et d'efficacité est profonde tant est grand le délitement des valeurs et principes républicains. Il est plus qu'évident qu'avec infiniment plus de moyens, plus de jeunes sortent aujourd'hui de l'école handicapés sociaux qu'il y a cinquante ans,

 

Chaque fonctionnaire d'Etat voit aujourd'hui ce nouvel oeil de Caïn l'interpellant sur son inutilité sociale, regard d'autant plus intolérable que dans un contexte de crise et de chômage les fonctionnaires ne sont pas menacés par le chômage,

 

Le gouvernement aurait pu, s'il avait été courageux résoudre cette question en créant des agences , en « télécommisant » une grande partie de la fonction publique d'Etat. Il ne l'a pas fait par bêtise, par manque de courage et aussi par cynisme !

 

LES NUISIBLES

 

Contrairement à une affirmation souvent entendue on ne remonte pas le temps. Ce n'est pas à un retour de l'Etat gendarme que l'on assiste mais à une liquidation de l'Etat providence pourvoyeur de richesse et d'utilité sociale. Sur les dépouilles de l'Etat providence est en train de se créer un autre Etat , expression de la nouvelle régulation qui métastase le corps social : L'Etat Abstinence,

 

L'Etat est en charge de gérer les peurs : la peur écologique qui est devenue la nouvelle Apocalypse de ce début de siècle, la peur sanitaire qui a remplacé la moyen-ageuse peur de la peste, la peur sécuritaire : celle du 11 septembre mais aussi celle qui nous vient de l'illusion d'immortalité qui s'est développée avec l'accroissement de l'espérance de vie.

 

 

De même que sous l'Ancien régime une aristocratie et un clergé parasitaire assistaient l'Etat dans le maintien de l'ordre social et moral (le sabre et le goupillon), nous avons aujourd'hui des pouvoirs parasitaires qui concourent à la mise en place de ce totalitarisme mou d'un nouveau genre : mollahs verts qui grouillent dans les associations de toutes sortes, flics médiatiques toujours en recherche de peurs à agiter et exploiter)

 

Pour imposer ces trois peurs, l'Etat a besoin de fonctionnaires : flics tout court terrorisant l'automobiliste au nom d'un risque routier zéro , flics sanitaires formés à l'holocauste ( une épidémie de fièvre aphteuse veut que l'on abatte des troupeaux entiers, l'éleveur devant s'estimer heureux d'échapper au massacre)nouveaux flics verts de la police de l'eau et de l'ordre vert totalitaire.

En vertu d'une constatation toute chargée de misanthropie et qui veut que chez beaucoup de nos concitoyens il y a un flic ou un Kapo qui sommeille , bon nombre de fonctionnaires ne sont pas fâchés de cette évolution de leur rôle : il vaut mieux pouvoir coller des PV que de se faire engueuler parce que l'on a refusé une subvention.

 

Le problème est que cet Etat Abstinence ( cette appellation vient de ce qu'il fonctionne essentiellement par interdits ou destruction des richesses) tient en lui les propres germes de sa destruction.

 

-Accepter de répondre aux peurs est une spirale sans fin. Pour les crétins panurgiques qui peuplent ce monde il n'y aura jamais assez de précautions : il faudra toujours plus de mesures et de moyens.

-Ce système détruit ce qui reste de l'économie : pour calmer les angoisses, il faut interdire les OGM , les pesticides, les centrales nucléaires , les voitures etc … L'économie s'anémie et la compétitivité s'étiole. On entre dans ce marécage de la croissance que nous a offert la Commission européenne.

-Comme la croissance s'étiole et la richesse disparaît, on n'a plus les moyens de payer les frasques de l'Etat.

 

Martin Kelenborn